Pourquoi la CFDT Fonctions Publiques n’a pas appelé les fonctionnaires à faire grève

 

Pourquoi la CFDT Fonctions Publiques

n’a pas appelé les fonctionnaires à faire grève

Revue Challenges - 22 mars 2018

 

La CFDT n’appelait pas à la mobilisation des fonctionnaires ce 22 mars. Les explications de Mylène Jacquot, leader de la CFDT Fonctions publiques.

 

Challenges : Pourquoi la CFDT n’a pas appelé les fonctionnaires à la grève le 22 mars ?

Mylène Jacquot : C’est avant tout une question de calendrier. A nos yeux, il était trop tôt pour appeler à la grève. Nous sommes en désaccord avec nombre des pistes de réformes du gouvernement, mais nous souhaitons jouer à fond le jeu de la concertation. Ce n’est jamais anodin de demander aux fonctionnaires de perdre une journée de salaire et nous estimons que nous n’avons pas encore utilisé tous les leviers de la négociation.

 

Avez-vous obtenu des gages de la part du gouvernement ?

Sur la question des salaires, nous sommes très mécontents du gel des traitements décidé par le gouvernement depuis l’été 2017. Nous avons obtenu que le rendez-vous salarial – initialement prévu à l’automne prochain – soit avancé au mois de juin. C’est une première satisfaction et donne la possibilité qu’une éventuelle augmentation salariale soit inscrite dans le budget 2019 qui se prépare dès l’été. La balle est dans le camp du gouvernement.

 

Plan de départs volontaires des fonctionnaires, assouplissement du statut, rémunération au mérite… Que pensez-vous des autres chantiers lancés par le gouvernement ?

L’expression « plan de départs volontaires » nous a choqué et nous souhaitons qu’elle soit supprimée des documents de travail du gouvernement. On ne sait d’ailleurs pas vraiment ce qu’elle recouvre dès lors qu’il existe déjà des indemnités de départs volontaires pour les fonctionnaires. Mais ce que le gouvernement se garde bien de dire, c’est que ce dispositif est actuellement très peu utilisé car le montant des indemnités est faible et les fonctionnaires n’ont pas de système d’assurance chômage.

 

Quid de l’assouplissement du statut des fonctionnaires et d’un recrutement accru de contractuels ?

Sur ces deux points, les projets du gouvernement demeurent flous. Il est faux de dire que le statut des fonctionnaires est immuable depuis 1946. Rien qu’au cours des cinq dernières années, il y a eu des modifications substantielles, par exemple pour mieux prévenir les conflits d’intérêts. S’agissant des contractuels, ils représentent environ 22 % des fonctionnaires aujourd’hui et cette part est relativement stable. Nous sommes convaincus que des solutions aux problèmes d’attractivité de la fonction publique existent en respectant le statut. Nous le dirons et ferons des propositions en ce sens. C’est au gouvernement de le démontrer. Mais il faut aussi se poser la question de l’évolution de carrière et des rémunérations de ces contractuels.

 

Que pensez-vous de la rémunération au mérite ?

Les primes pèsent en moyenne 20 % de la rémunération des fonctionnaires, même si c’est très variable d’un métier à l’autre. Donc, il existe déjà des formes de rémunération au mérite. A la CFDT, nous défendons des dispositifs qui récompensent les performances collectives des services plutôt qu’une individualisation accrue des rémunérations à laquelle nous nous opposerons. Tout en insistant sur le mérite individuel, le gouvernement ne ferme pas la porte à de nouveaux mécanismes de primes collectives. La discussion ne fait que commencer.

 

La tenue des élections professionnelles de toute la fonction publique en décembre ne vient-elle pas perturber la concertation lancée par le gouvernement ?

Il est évident qu’un climat de campagne électorale est peu propice à la concertation. Chaque syndicat pourrait être tenté de renforcer sa ligne pour marquer sa différence avec les autres organisations. C’est, entre autres, pour cette raison que nous avons demandé au gouvernement de repousser la date de la fin de la concertation, afin d’éviter qu’elle tombe quelques semaines seulement avant l’élection…